mardi 24 avril 2018
vendredi 20 avril 2018
mercredi 18 avril 2018
mardi 17 avril 2018
mardi 10 avril 2018
Secret-défense ou l’État de non-droit
Une mini-réforme du secret-défense est en chantier en
France, pour complaire aux amis de l’OTAN. Mais il ne s’agit pas d’abandonner
un si précieux outil de contrôle de l’information. Et ce n’est pas cela qui
fera sortir les nombreux cadavres encore dans les placards. En butte aux refus
de l’administration ou aux caviardages des dossiers, le collectif « Secret
défense, un enjeu démocratique » voudrait qu’on cesse de prendre les
citoyens, au mieux, pour des bisounours, au pire pour des espions…
Presque cinq ans que Ghislaine
Dupont et Claude Verlon, les deux envoyés spéciaux de Radio France
Internationale (RFI), ont été assassinés au Mali : il y a quelques semaines
seulement, un juge du pôle antiterroriste français qui instruit l’affaire a pu
se rendre pour la première fois à Bamako la capitale (et non là où les
journalistes furent enlevés, à Kidal, dans l’extrême-nord, pour des raisons de
sécurité). On a promis de lui transmettre bientôt les relevés téléphoniques des
suspects présumés, que son prédécesseur, le juge Marc Trévidic, réclamait
depuis quatre ans…
En l’absence de documents
déclassifiés clairs — car ils sont régulièrement amputés en vertu du
secret-défense — on en est toujours réduit à des hypothèses sur les motifs du
rapt et de l’assassinat : une vengeance liée au non-versement d’une part de rançon
lors de la libération des otages d’Arlit, ou à la non-libération promise de
proches des ravisseurs ; ou une opération qui aurait mal tourné, les ravisseurs
ayant exécuté les deux journalistes sans préméditation, suite à une panne de
véhicule ou à la patrouille inattendue d’un hélicoptère. Mais lequel, pourquoi
? L’insécurité persistante au nord du Mali, l’invocation du secret-défense, ou
la déclassification de documents sans intérêt ou incomplets ont empêché
jusqu’ici d’en avoir le cœur net, même si l’on sait que — sous le sceau du
secret-défense justement — des éléments des services de renseignements
extérieurs ou des forces spéciales de l’armée française ont entrepris de «
faire justice » à leur manière.
Carcan de la victimologie
Du coup, l’association des amis
de Ghislaine Dupont et Claude Verlon s’est rapprochée du collectif « Secret
défense, un enjeu démocratique » — animé notamment par Elisabeh Borrel, veuve
d’un magistrat français assassiné à Djibouti il y a vingt-trois ans, et
elle-même magistrate. Le collectif s’est formé à la suite d’une table-ronde sur
le secret-défense, quelques semaines avant que le président Emmanuel Macron ne
promette, le 28 novembre 2017 à Ouagadougou, de communiquer aux juges
burkinabés tous les documents français dans le dossier de l’assassinat de
l’ancien président Thomas Sankara (1).
" Lire aussi Rémi Carayol, «
Le mystère Thomas Sankara », Le Monde diplomatique, janvier 2018. "Pour
Mme Elisabeth Borrel, venue témoigner lors de la récente assemblée générale des
Amis de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, « le droit n’existe pas quand une
affaire a une dimension internationale ». Le règne du secret-défense équivaut
au contraire à « un état de non-droit », et ramène ceux à qui il est opposé à «
un statut d’espion ou de bisounours ». Une constatation douloureusement vécue
par la veuve du juge Borrel, dont l’assassinat avait été maquillé en suicide,
puis mis sur le compte d’une affaire de pédophilie, son épouse ayant été
présentée un temps comme « folle ».
Se défendant de toute naïveté, la
magistrate cherche à sortir aujourd’hui du « carcan de la victimologie » et se
bat pour empêcher que les « États totalitaires n’imposent leur version » des
affaires et trouver les moyens de vérifier que la législation du secret-défense
est correctement appliquée.
Le collectif Secret-défense
regroupe des familles et proches de victimes d’affaires criminelles, engagés
aujourd’hui dans une dizaine de procédures judiciaires dans lesquelles le
secret-défense compromet la manifestation de la vérité, ainsi que des
historiens et des journalistes confrontés au refus de l’État et de
l’administration de communiquer des documents.
Dans les placards
Dans une lettre au président de
la République, écrite dans le sillage de l’annonce faite à Ouagadougou, le
collectif estime que « la chronologie des affaires à travers l’histoire depuis
1944 au moins, démontre la constance des blocages dans le temps, par la notion
de secret-défense, qui est utilisée de façon très large dans notre pays. Aussi,
notre collectif souhaite que vous puissiez nous recevoir pour évoquer avec
vous, à la fois, les obstacles que nous rencontrons, leurs conséquences et la
nécessaire évolution juridique de cette notion de secret-défense et de son
contrôle pour la rendre compatible avec la Convention européenne des droits de
l’homme et les nécessités impératives de transparence d’un État démocratique ».
Le collectif rassemble des
individus et associations cherchant à établir la vérité dans une série de
dossiers, outre celui des envoyés spéciaux de RFI Ghislaine Dupont et Claude
Verlon, enlevés et assassinés le 2 novembre 2013 :
• le naufrage du chalutier breton
Bugaled Breizh, le 15 janvier 2004 ;
• l’assassinat du magistrat
Bernard Borrel à Djibouti le 18 octobre 1995 ;
• le rôle de la France dans le
génocide des Tutsis au Rwanda en 1994 ;
• l’explosion de la Maison des
Têtes à Toulon, le 15 février 1989 ;
• l’assassinat de Thomas Sankara,
président du Burkina Faso, et de ses compagnons, le 15 octobre 1987 ;
• la destruction en vol au-dessus
d’Ustica, en Italie, d’un avion de ligne, le 27 juin 1980 ;
• l’assassinat de Robert Boulin,
ministre en exercice, le 29 octobre 1979 ;
• l’enlèvement et la disparition
de Mehdi Ben Barka à Paris, le 29 octobre 1965 ;
• les massacres d’Algériens à
Sétif, le 8 mai 1945, et à Paris, le 17 octobre 1961 ;
• la « disparition » de
l’universitaire Maurice Audin en Algérie en 1957 ;
• le massacre des tirailleurs «
sénégalais » au camp de Thiaroye, le 1er décembre 1944.
Ce collectif a d’ailleurs
vocation à s’élargir : des contacts ont été pris dans l’affaire des victimes de
l’attentat de Karachi, de la Caravelle d’Ajaccio, du bombardement de Bouaké —
la liste n’est pas exhaustive. Il y a d’autres affaires dans les placards. Par
exemple :
• l’élimination à Genève, le 3
novembre 1960, du nationaliste camerounais Félix Moumié ;
• l’assassinat le 13 janvier 1963
du président togolais Sylvanus Olympio par les putschistes du sergent
Gnassingbe Eyadema ;
• l’assassinat du militant
internationaliste Henri Curiel, le 4 mai 1978 à Paris ;
• les opérations plus ou moins
téléguidées ou « autorisées » du mercenaire Bob Dénard ;
• l’assassinat à Paris le 29 mars
1988 de Dulcie September, la représentante du Congrès national africain (ANC) à
Paris, etc.
" Lire aussi Sabine Cessou,
« L’ANC, aux origines d’un parti-État », Le Monde diplomatique, mars 2018.
"La plupart de ceux qui ont eu à enquêter sur ce type de dossiers se
plaignent de la difficulté à faire lever le secret-défense, et à déclassifier
des documents qui, à l’usage, se révèlent souvent sans intérêt, incomplets, ou
franchement caviardés. Le juge Trévidic affirme qu’en dix ans d’antiterrorisme,
il n’a jamais eu accès qu’à des documents « confidentiel défense », le plus
faible degré de classification (derrière le « secret-défense », et le «
très-secret-défense ») : « Les pièces déclassifiées, c’est la bibliothèque rose
», raille le juge (2).
Objet de fantasmes
Au gouvernement, bien sûr, on
rappelle l’utilité du secret. « Objet de bien des fantasmes, qui l’assimilent
encore parfois aux excès d’une raison d’État oublieuse des droits et libertés,
le secret est pourtant un outil essentiel de défense de nos intérêts
diplomatiques, économiques, stratégiques et sécuritaires », affirme Louis Gautier,
le patron du secrétariat général pour la défense et la sécurité nationale
(SGDSN).
Sous l’autorité conjointe du
premier ministre et du ministère de la défense, le SGDSN met en œuvre cette
politique du secret d’État dans une optique interministérielle. Contrairement à
une image courante, le secret-défense n’est pas seulement d’ordre militaire. Le
nucléaire civil est également couvert par le secret, tout comme les sociétés
ayant conclu des contrats avec l’État. De manière plus générale, les grandes
entreprises industrielles ou commerciales ont intérêt à protéger leurs procédés
de fabrication, leurs tarifs et indicateurs économiques, etc.
Le SGDSN évalue à quatre cents
mille le nombre de personnes « habilitées au secret », notamment au sein des
forces de sécurité, mais aussi dans les secteurs « sensibles » de l’énergie,
des transports, etc. Il s’appuie sur un réseau de quatre mille officiers de sécurité,
désignés dans les administrations et les entreprises, qui traitent et
détiennent des informations et supports classifiés, au nombre –- paraît-il –-
de cinq millions d’unités. Près d’un tiers de ces officiers exercent leurs
fonctions dans le secteur privé.
Le SGDSN évalue à quatre cents
mille le nombre de personnes « habilitées au secret », notamment au sein des
forces de sécurité, mais aussi dans les secteurs « sensibles » de l’énergie,
des transports, etc.
Sous le président Sarkozy, le
domaine du secret-défense avait été étendu non plus seulement à des documents
mais à des lieux : une vingtaine d’enceintes considérées comme stratégiques
avaient été soustraites à la curiosité des juges et des policiers.
D’ici la fin de l’année
prochaine, à l’issue de la concertation interministérielle en cours, la
réglementation du secret-défense devrait évoluer en profondeur, assure le SGDSN
qui en a détaillé les objectifs dans un rapport récent (PDF), d’une minceur extrême.
Il s’agit de :
• faciliter les échanges
internationaux qui augmentent de manière exponentielle et aligner avec nos
principaux alliés nos niveaux de classification ;
• améliorer la prise en compte de
l’information classifiée dématérialisée et la protection des systèmes
d’information contenant de telles informations de façon à s’adapter à la menace
cyber ;
• protéger l’information tout au
long de son cycle de vie, de sa conception à la fin de son exploitation ;
• changer la dénomination des
niveaux de classification afin de mettre en évidence la nature
interministérielle du secret avec, à l’avenir, deux nouvelles appellations «
Secret » et « Très secret » ;
• réviser la procédure
d’habilitation pour réduire les délais d’enquêtes ;
• la classification ne pourra
dépasser cinquante ans, « sauf dispositions particulières prévues par le code
du patrimoine et destinées notamment à lutter contre la prolifération des armes
nucléaires, radiologiques, biologiques, chimiques », les informations restant
dans ces cas « incommunicables de façon permanente, conformément à nos
engagements internationaux ».
" Lire aussi Joseph K., «
Cet archaïque secret d’État », Le Monde diplomatique, juillet 2000. "Au
total, il convient avec cette réforme, selon le secrétaire général du SGDSN
Louis Gautier, « d’éviter une inflation inutile de données classifiées », au
moment où les associations de défense des droits de humains, les juges
d’instruction, et les chercheurs se plaignent des excès du secret-défense. Mais
aussi et peut-être surtout, de permettre des échanges plus harmonisés avec les
partenaires de l’UE et de l’OTAN : le SGDSN rappelle que Paris a signé 41
accords généraux de sécurité avec des États étrangers, et que, dans le cadre
des exportations d’armement, le volet protection du secret est d’un intérêt
majeur.
« Ces différents chantiers
témoignent d’une volonté de concilier au mieux le secret de la défense
nationale avec les exigences de transparence d’une société démocratique, tout
en consolidant les règles et les modalités d’application pour assurer la plus
grande sécurité de notre pays et la meilleure protection de ses intérêts
fondamentaux », soutient ce rapport officiel qui ne dit rien ou presque de la
commission d’accès aux archives du SGDSN, composée notamment de parlementaires,
chargée de donner un avis sur la déclassification des documents, et dont la
composition et le mode de travail sont régulièrement mis en cause.
Philippe Leymarie
mardi 3 avril 2018
MOTIVATION DU JOUR
La vie en elle-même est une toile vide; elle devient ce que vous peignez dessus.
Vous pouvez peindre la misère ou la joie.
Cette liberté est votre splendeur.
Vous pouvez peindre la misère ou la joie.
Cette liberté est votre splendeur.
Inscription à :
Articles (Atom)
DON D'OUVRAGE DU Pr Jean Marc ALAUZET
La bibliothèque centrale de l'IUG a reçu le vendredi 13 septembre 2019, un important dont d’ouvrages du Pr Jean Marc ALAUZET. La cér...

-
Le projet lui-même est en général distinct des missions que l’étudiant assure par ailleurs dans l’entreprise en tant que salarié. Le proje...
-
ATELIERS D'ORIENTATION 2018 BTS MECATRONIQUE Cette spécialité a pour objectif de rendre les étudiants aptes à assurer...
-
1-Concours ESSEC_1ere anne Études Professionnelles Approfondies 2018 /https://goo.gl/ATZ3r8 2-Concours ESSEC _1ere annee Etudes Supérieure...