Déclaration de Phumzile
Mlambo-Ngcuka, Secrétaire générale adjointe des Nations Unies et Directrice
exécutive d’ONU Femmes, à l’occasion de la Journée internationale des femmes
Date : jeudi 1 mars
2018
Le thème de cette année illustre
la vie trépidante des femmes activistes, dont la passion et l’engagement ont
assuré l’acquisition des droits des femmes au fil des générations et ont mené à
des changements réussis. Nous célébrons un mouvement mondial sans précédent
pour les droits des femmes, l’égalité, la sécurité et la justice, en
reconnaissant le travail inlassable des activistes qui a été d’importance
cruciale dans l’initiative planétaire en faveur de l’égalité des sexes.
Ce que nous voyons aujourd’hui
est en fait une mise en commun du courage des femmes partout dans le monde, une
démonstration de la puissance qui se dégage lorsqu’on parle d’une même voix en
réclamant des perspectives et de la redevabilité, et en puisant d’une dynamique
présente dans les réseaux et les coalitions sur le terrain qui remontent
jusqu’au leadership politique. Ces mouvements sont issus du travail effectué
par des activistes depuis plusieurs générations – de la leader féministe Asma
Jahangir du Pakistan, défenseuse des droits humains qui nous a quittés jusqu’à
la puissante nouvelle génération représentée par des jeunes femmes comme Jaha
Dukureh de la Gambie, ambassadrice de bonne volonté régionale d’ONU Femmes pour
l’Afrique contre les MGF et le mariage précoce.
Les sociétés bien portantes
disposent d’un vaste éventail de voix et d’influences qui apportent les
contre-pouvoirs nécessaires, différentes expériences et perspectives, ainsi que
des discussions qui définissent les décisions appropriées. Lorsque des voix
manquent, il existe une lacune importante dans le tissu social. Lorsque les
voix mises en sourdine se comptent par millions, nous savons que quelque chose
ne va pas dans notre monde. De même, lorsque nous voyons et entendons ces voix
monter en force de manière solidaire, nous sentons se manifester la puissance
de quelque chose de bien.
Nous saluons les femmes qui ont
courageusement plaidé pour pouvoir accéder à la justice, telles que celles du
mouvement #MeToo, qui ces derniers mois ont découvert la présence de leur
plaidoyer dans les médias sociaux dans plus de 85 pays dénonçant ceux qui se
sont attaqués aux faibles et montrant que lorsque les femmes s’entraident, cela
contribue à surmonter la stigmatisation et à s’assurer que l’on finit par croire
à ce qu’elles racontent.
Nous saluons les femmes qui se
sont exprimées à la Cour pénale internationale, où leurs témoignages ont forcé
ceux qui ont utilisé le viol comme une arme de guerre à rendre compte de leurs
actes. Nous célébrons les activistes qui ont fait campagne pour l’égalité des
droits des lesbiennes, des gays, des bisexuels, des transgenres et des
personnes intersexuées, et nous exprimons notre reconnaissance à celles qui ont
plaidé en faveur de réformes juridiques dans des pays comme la Tunisie, pour
supprimer une disposition autorisant les violeurs à échapper à des poursuites
s’ils épousent leurs victimes. Nous sommes reconnaissants envers celles qui
sont descendues dans la rue en Inde pour dénoncer le meurtre et le viol de
jeunes enfants, transformant ainsi des protestations en vastes mouvements
mobilisant des communautés entières. Nous honorons les dirigeants autochtones
qui ont défendu leurs droits de garde des terres ancestrales et leurs pratiques
traditionnelles, ainsi que les défenseurs des droits humains qui ont même perdu
la vie pour leur cause.
Le mouvement féministe doit
continuer à accroître la diversité et le nombre de personnes travaillant à la
promotion de l’égalité des sexes, en faisant participer les individus et les
groupes - tels que les hommes et les garçons, les jeunes et les organisations
confessionnelles - au soutien et à l’agencement des projets, afin que les
jeunes hommes et les garçons apprennent à apprécier et à respecter les femmes
et les filles, et apporter ainsi des changements dans le comportement des
hommes. L’activisme d’aujourd’hui doit parvenir à modifier la façon dont nous
écoutons les femmes et dont nous les regardons, en reconnaissant le pouvoir des
stéréotypes à influencer la valeur que nous attribuons aux personnes. Un
mouvement de femmes capables d’aborder ces questions est d’importance cruciale,
mais nous avons aussi besoin d’un mouvement d’hommes féministes.
Ce doit être le tournant : mettre
fin à l’impunité et à la souffrance silencieuse des femmes dans les zones
rurales et urbaines, y compris les travailleuses domestiques. Les activistes
d’aujourd’hui doivent autonomiser celles qui sont les plus susceptibles d’être
laissées pour compte, dont la majorité sont des femmes, comme le montre notre
dernier rapport « Traduire les
promesses en actions ». Dans toutes les régions, les femmes sont plus
susceptibles de vivre dans une pauvreté extrême que les hommes. Cet écart
s’élève jusqu’à 22 pour cent pour celles âgées de 25 à 34 ans, soit la période
de procréation maximale, ce qui souligne clairement le dilemme - la
réconciliation des revenus et des activités domestiques - auquel tant de femmes
sont confrontées et pour lequel des changements de politique et des initiatives
sont indispensables.
ONU Femmes entretient une
relation particulière avec le mouvement des femmes ; notre organisation est
issue de cet activisme. La société civile a un rôle crucial à jouer sur le plan
historique en prenant la tête des initiatives à l’échelle mondiale en matière
de promotion des réformes, en faisant ressortir la complexité des défis
auxquels font face les femmes, en influençant l’élaboration de politiques, en
participant à leur suivi et en maintenant le sens des responsabilités. Nous
devons délibérément créer un soutien accru pour l’activisme politique des
femmes et un espace plus large pour la voix des femmes de la société civile,
afin que nos efforts s’associent et ciblent celles qui ont le plus besoin que les
choses changent. La culture de la pauvreté basée sur le genre, la maltraitance
et l’exploitation doivent disparaître avec l’avènement d’une nouvelle
génération ancrée dans une égalité durable.
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